Fipronil : notre rétrospective

Depuis maintenant plusieurs semaines, l’affaire FIPRONIL de cet été ne fait plus le buzz médiatique ;  il nous a paru intéressant d’en retracer son déroulement,  qui a aujourd’hui des conséquences importantes sur notre filière : la première étant un niveau de marché complètement inattendu (en particulier  les cours industrie) et sans doute durable à moyen terme .

Les autres effets à venir pourraient être un ralentissement de la transition code 3 vers l’alternatif, nouveaux moyens d’investir et probablement à moyen terme augmentation de la production en France, méfiance du consommateur, difficultés financières dans la filière, méfiance et contrôles toujours plus accrus de nos autorités sanitaires sur la filière pondeuses… 

Et bien d’autres effets encore difficiles à mesurer.

Le déroulement des faits

La première alerte est donnée à l’AFSCA (équivalent belge de notre DDPP) par un exploitant qui constate lors d’un test d’autocontrôle la présence de fipronil dans ses œufs. L’agence lance alors une série de tests et de contrôles, bloque un certain nombre de lots et tente de remonter à la source de la contamination…

En suivant la piste du traitement contre le pou rouge, elle établit un lien avec les Pays Bas au travers d’une firme locale, jamais nommée par le ministre mais identifiée par les médias belges et néerlandais comme l’entreprise  CHICKEN-FRIEND. Cette
firme a reconditionné le produit  “DEGA-16” censé être naturel pour désinfecter les poulaillers.

L’afsca fait une première demande d’information à son homologue néerlandaise dès le 19/06  mais n’a une première réponse que le 13/07.  Il semblerait que les autorités néerlandaises étaient au courant du problème depuis novembre 2016 voire Juin selon certains autres opérateurs.

L’affaire commence à filtrer dans les médias français vers le 20/07 sans que personne n’y attache beaucoup d’importance (cf notre rubrique actualités du 25/07 ou la RTBF parle du problème d’une manière plutôt anodine).

Lancement d’une enquête pénale aux Pays Bas après l’interception d’un paquet à l’aéroport d’Amsterdam contenant du fipronil , envoyé par le producteur belge de “dega 16” à une adresse des Pays Bas.  “Nous n’avons pas pu avoir accès à la liste des clients de la firme hollandaise, ça veut dire que l’agence n’a pu déterminer plus tot avec précision le périmètre suspect qui concernait 86 exploitation “  s’explique l’afsca.

Le 20/07 l’UE est contactée après des perquisitions :  “c’est le premier moment ou il y a suffisamment d’informations pour permettre aux Etats Membres d’agir. Des la dernière semaine de Juillet des prélèvements sont effectués dans des élevages néerlandais allemands et belges.  Des oeufs sont consignés , des élevages bloqués voire des poules éliminées.

Début Août la presse non spécialisée commence à parler du problème en évoquant le fait que “la Neerlandise voedsel (équivalent de notre DDPP) a invité lundi 31/07 la population néerlandaise à ne pas consommer ces oeufs portant certains codes en raison de leur haute concentration en Fipronil et du danger qu’ils représentent.  En grande quantité , cet insecticide peut en effet se révéler nocif pour les reins , le foie et la glande thyroïdienne. A cette date 180 des 1000 élevages néerlandais ne  peuvent plus sortir d’oeufs car l’autorité sanitaire redoute que du Fipronil y a été utilisé.

Dès lors une inquiétude grandissante voit le jour en Allemagne au sujet des oeufs provenant de Belgique et des Pays Bas Certains états fédéraux dont la Rhénanie Westphalie rapellent plus d’un million d’oeufs après avoir découvert la présence d’insecticides dans certains oeufs

Le 31/07 des opérateurs belges préviennent leurs clients , en particulier , de ne pas utiliser les oeufs provenant de certains codes élevages (en particulier code 2) ; ils évoquent le fait que des prélèvements pour analyse ont été faits et qu’il faut attendre les résultats des analyses pour utiliser les oeufs.

Le feu aux poudres est dès lors mis dans la filière Française.

Dès fin Juillet  la chaîne de magasins  Aldi annonce retirer de ses magasins tous les oeufs de la vente en Allemagne  (info  AFP  notre rubrique actualités du 4/08). Il ne s’agit que d’une mesure de pure précaution. La filière ovoproduits française est la seule touchée et petit à petit après information par les DDPP les médias français s’emparent du sujet avec un paroxysme les lundi 7 et mardi 8/08 (journaux télévisés TF1 et Antenne2, radios nationales en boucles , Une du journal Ouest France le mardi 8/08)

Le mercredi 9/08 une liste de 5 opérateurs français (ovo-produits) est mise en avant (notre rubrique actualités des 9/08 sources le Figaro). Parallèlement le marché des œufs français semble digérer le coup se trouvant même (momentanément?) dopé par les besoins des opérateurs français qui n’osent plus s’approvisionner sur le marché international.

D’une manière générale, les autorités sanitaires françaises et les opérateurs concernés communiquent sur l’étendue du problème qui ne concernerait que des petites quantités d’œufs (30000 œufs(?) par exemple pour Igreca ou seulement des lots peu importants par rapport à l’activité des autres opérateurs.

Un élevage français du Pas de Calais est également concerné  (cf notre rubrique actualités du 9/08)

Tous les gens concernés s’accordent pour l’instant à dire que la dangerosité du problème Fipronil oeufs est faible (les analyses ne révèlent que de très faibles concentrations diluées dans les fabrications des utilisateurs de l’agro-alimentaire).

L’affaire, même si elle semble avoir atteint son paroxysme hier, n’est sans doute pas terminée ; ses conséquences sont de toute façon encore à venir.

Le 10/08 : Deux opérateurs   néerlandais suspectés d’être à l’origine de la diffusion du produit contant du Fipronil ont été arrêtés ; des documents, du matériel informatique et 6000 litres de produit interdits ont été saisis. Au moins 780000 œufs contaminés ont été importés au royaume uni ; la Roumanie est également concernée par l’import de produit contaminé

Le 11/08 : deux nouvelles entreprises françaises sont concernée par le problème une en Vendée, l’autre dans la Somme sans que leurs noms ne soient citées (une entreprise d’ovo -produits et une entreprise de conditionnement d’après le ministre de l’agriculture)

Le 12/08 : au moins 17 pays de la communauté européenne sont touchés ; Hong Kong a également reçu des œufs contaminés et a demandé des comptes aux autorités Néerlandaises. Dans le Nord de la France 240000 œufs (dont au moins 200000 bio) ont été retirés de différents supermarchés.

Le 16/08 : le gouvernement français va publier une liste de produits contaminés ; personne ne sait aujourd’hui quelles mesures vont être prises concernant ces produits ; les autorités sont néanmoins très rassurantes sur la faible toxicité du produit et sa faible présence dans les produits incriminés.

“Le buzz médiatique est passé”

Semaine  34 : le buzz médiatique est passé. Toujours des communications des pouvoirs publics sur les produits à risque. L’Italie est également touchée par la crise :  la production de 26000 poules est séquestrée dans la région de Rome , 92000 œufs contaminés sont retirés de la vente ainsi que des omelettes surgelées d’origine Néerlandaises ; divers produits alimentaires sont suspectés. Les Pays Bas évaluent le cout direct sur leur filière œufs à 33millions €. La Belgique n’a toujours pas fait le point et est toujours incapable des listes claires d’élevages contaminés.

Affaire à suivre…