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Les éleveurs en plein air exaspérés par le confinement des volailles

En raison du risque de grippe aviaire, les volailles sont confinées depuis un arrêté pris le 5 novembre par le gouvernement. Les éleveurs en plein air s’estiment lésés par cette décision, alors que le secteur a affronté une vague importante de grippe l’an passé.

Depuis le 5 novembre, la volaille est confinée. À cette date, l’influenza aviaire, virus saisonnier charrié par les oiseaux migrateurs, a été classée à « risque élevé » de diffusion sur le territoire. Sauf que des éleveurs de plein air s’estiment lésés par cette décision. À l’appel notamment de la Confédération paysanne, syndicat agricole, des éleveurs bretons se sont réunis ce week-end dans le Morbihan.

La gronde est plus large. Dans le Gers, une éleveuse bio explique, sous le couvert de l’anonymat, avoir refusé de confiner ses bêtes : « Il y a peu de densité sur mon élevage et mes poules sont élevées et abattues sur place, justifie-t-elle. Il y a une relative autarcie, avec des interactions limitées, je ne fais pas prendre de risque aux autres. »Plusieurs éleveurs en plein air du Sud-Ouest refusent aussi de se soumettre aux règles.

« Tromperie pour le consommateur »

La Confédération paysanne estime que cette situation est différente de plus gros élevages effectués dans des hangars. « Les individus de ces élevages sont très proches génétiquement, ce qui favorise la diffusion du virus, explique Denis Perreau, le secrétaire national. Ces productions sont segmentées ce qui augmente les risques de contaminations : par exemple, elles sont transportées pour être abattues. » Le dernier foyer de contamination en France a été détecté dans un gros élevage de poules pondeuses du Nord.

Surtout, les éleveurs sont inquiets de produire une volaille qui ne correspond plus au cahier des charges « élevé en plein air » ou « bio », qui implique l’élevage de plein air. Si le gouvernement a prévu des dérogations pour maintenir les labels en dépit des confinements, Denis Perreau invoque une « tromperie pour le consommateur » qui décrédibilise la filière plein air.

« Très compliqué de tenir compte des situations particulières »

« Il est très compliqué de tenir compte des situations particulières en raison de la grande diversité des modes de production, des espèces… estime Jean-Luc Guérin, professeur à l’École nationale vétérinaire de Toulouse (ENVT), spécialiste de la pathologie aviaire. Le risque de règles différenciées est d’avoir une véritable usine à gaz. Aujourd’hui, la règle permet des adaptations. Par exemple, les petits éleveurs en plein air peuvent déroger au confinement si un vétérinaire établit que c’est important pour le bien-être animal. »

Les foyers sont pour l’instant limités au nord du pays et à l’est, mais le professeur appelle à la vigilance, à rebours des demandes de normes régionalisées des thuriféraires du plein air. « La situation est critique car il y a une exposition maximale au virus, explique-t-il. Son introduction dans les élevages est souvent plus sournoise qu’un oiseau sauvage qui s’immisce. Il faut absolument éviter que le virus parvienne dans les zones à forte densité d’élevage que sont la Bretagne, la Vendée et le Sud-Ouest. Il faut éviter l’introduction initiale. »

Des risques de pertes économiques importantes

La forte percée du virus de la grippe aviaire entre la fin 2020 et le début de l’année 2021 a conduit à une chute drastique de la production et donc des exports. Le Cifog, l’interprofessionnelle du foie gras, chiffre à 22 % la baisse de production de canards cette année, des millions d’entre eux ont été abattus, principalement dans le Sud-Ouest, souvent de manière préventive, pour combattre l’épidémie. Il n’y aura toutefois pas de pénurie de foie gras cette année « en raison des stocks liés à la chute de débouchés en restauration et à l’international de 2020 », expliquait le Cifog en octobre.

Mais l’ensemble des acteurs ne veut pas d’une nouvelle crise. « Les crises passées ont occasionné des pertes économiques importantes pour la filière avicole : entre 450 et 600 millions d’euros », chiffre Yann Nédélec, directeur de l’Anvol, l’interprofessionnelle de la volaille de chair.

La présence de l’épidémie en France classe le pays à risque, ce qui fait chuter les exportations. « Il y a les produits qui ne seront plus vendus comme le foie gras… mais aussi la France est très réputée pour ses exportations de reproducteurs à haut potentiel génétique, détaille Jean-Luc Guérin. C’est une perte économique importante. »

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