
Brigitte Gothière est co-fondatrice de L214, association de protection animale qui milite pour une abolition des pratiques liées aux animaux d’élevage. Nous l’avons interrogée sur le phénomène grandissant d’ « agri-bashing », que de nombreux agriculteurs lient entre autres à la diffusion répétée, par cette association ou les médias télévisés, de photos et vidéos choc sur le sujet.
A terme L214 veut l’abolition de toutes les pratiques d’élevage
L214 souhaite que notre société en arrive à reconnaître que les animaux ne sont pas des biens à notre disposition, et ne permette plus qu’ils soient utilisés comme tels. Ils sont eux aussi des habitants de cette planète et leurs intérêts méritent considération.
Voici ce que l’on peut lire notamment sur la page de présentation de l’association L214, qui milite, à terme, pour l’abolition totale des pratiques qui consistent à élever des animaux pour la consommation humaine (alimentation ou autre usage).
Pas étonnant, dès lors, que l’entente entre ses adhérents et les acteurs du monde agricole paraisse impossible. Pour autant, Brigitte Gothière assure :
Évidemment que l’on est opposé à tout acte de violence envers des agriculteurs ! Mais il est vrai que ces dernières années, on a l’impression d’une recrudescence de la violence. Nous-mêmes nous faisons aussi régulièrement agresser et insulter !
Problème : « L’absence de débat public »
Pour elle, les actions menées par L214 n’ont pas pour objectif de jeter la pierre aux agriculteurs, mais à un modèle agricole jugé dépassé :
Il y a des questions très importantes à se poser à ce sujet. Mais dès qu’on le fait, il y a une levée de boucliers. Le problème, c’est l’absence de débat public. Ce ne sont pas les agriculteurs les coupables, mais le gouvernement. Jusqu’à présent, on a toujours été confrontés à une fin de non-recevoir de la part des élus. Or, il y a une demande citoyenne très forte pour prendre en compte le bien-être animal. Par exemple en ce qui concerne les poules pondeuses, les sondages montrent que 90 % des gens sont opposés aux élevages en cages.
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« La FNSEA a la mainmise sur l’Etat »
Alors que les représentants de la FNSEA se plaignent de ne pas être entendus par le gouvernement (lire notre dossier dans l’édition de L’Eclaireur du 11 janvier 2019), L214 juge au contraire que cette fédération agricole a « la mainmise sur les débats au niveau national ».
L’association lui reproche aussi son opposition systématique à toute action visant à réduire un peu la consommation d’aliments animaux : « Par exemple sur la proposition des Lundis verts, il y a tout de suite eu une nouvelle levée de boucliers. Alors que ce sont des chercheurs, et non des militants, qui ont lancé cette opération. Bien sûr, on la soutient. Mais si on écoute certains syndicats agricoles, on a l’impression qu’il faudrait ne rien changer. Nous, on cherche à trouver des solutions, pas à désigner des coupables », insiste Brigitte Gothière.
« A l’Etat de faire l’arbitrage ! »
Elle persiste aussi sur le rôle de l’État dans cette situation :
C’est à l’État de donner une ligne directrice pour une alimentation durable, de faire un arbitrage en s’appuyant sur les discours des scientifiques.
Enfin, elle précise aussi, concernant les motivations de L214 : « Le véganisme est une question très importante pour nous. Mais à court terme, on se bat avant tout contre les pratiques d’élevages intensifs. Cependant, je ne vois pas comment on peut provoquer la réflexion en menaçant des gens ou en cassant des installations… ».