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Contre l’élevage en cage, la pression citoyenne s’intensifie en Europe

Signée par plus de 900 000 personnes et soutenue par 140 associations de défense animale, une initiative citoyenne européenne pourrait obliger l’UE à se prononcer sur l’interdiction de l’élevage en batterie.

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Les poules pondeuses ne sont pas les seules à passer leur courte existence dans des cages dites «aménagées». Avec près de 370 milliards d’animaux confinés derrière des barreaux chaque année, l’élevage en batterie restait, en 2017, largement plébiscité par les éleveurs européens. Décriées par les associations de défenses animales depuis des décennies, les cages, qui rappelons-le ne satisfont pas les besoins physiologiques des lapins, canards, cailles et autres truies gestantes, n’ont cependant plus la cote. Outre des sondages, qui montrent régulièrement l’opposition des consommateurs à ces modes d’élevage, plusieurs pays européens ont par exemple interdit certains modes de production en batterie. C’est le cas du Luxembourg, de l’Autriche et de l’Allemagne qui ont banni l’élevage des poules pondeuses en batterie à compter de 2020 et 2025 dans la foulée des grandes enseignes de distribution – mais pas la France ; ou de la Suède et du Royaume-Uni qui ont mis fin aux cages de gestation – voire de mise bas – pour les truies.

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En 2012, l’Union européenne a également prohibé au niveau européen les cages conventionnelles pour les poules pondeuses. Cependant, la réglementation européenne, qui définit l’espace minimal à disposition des poules dans les cages, est bien souvent enfreinte. Ce qu’ont montré les associations comme L214 en filmant des exploitations dans l’illégalité. «Il y a attente sociétale forte concernant l’interdiction des cages, souligne à ce propos Brigitte Gothière, la cofondatrice de l’association animaliste. Mais l’enjeu est aussi environnemental, sanitaire et social puisque les conditions de travail sont difficiles dans ce type d’élevage intensif.» «Le système en batterie n’est ni acceptable, ni durable, abonde Claire Hincelin, de l’association CIWF, qui défend le bien-être animal des animaux de ferme. Il faut donc une position forte de l’UE sur ce sujet.»

Marathon pétitionnaire

Pour faire bouger les lignes, son ONG a donc décidé de lancer en octobre dernier une initiative citoyenne européenne (ICE) sur l’interdiction de l’élevage en cage, aujourd’hui soutenue par plus de 140 organisations européennes de défense animale. Depuis 2012, ce dispositif, censé favoriser la participation citoyenne dans l’Union européenne, permet en effet d’inviter la Commission européenne à prendre position sous trois mois (ou du moins à motiver son refus de le faire) au terme d’un marathon pétitionnaire d’une année. «L’intérêt de ce mécanisme, c’est qu’il permet aux citoyens de dire à l’UE qu’il est impératif qu’elle se saisisse d’un sujet, explique l’eurodéputé écolo-marcheur Pascal Durand, auteur récemment d’un essai sur la protection animale dans l’UE. Le problème, en revanche, c’est qu’il n’y a aucune obligation pour la Commission à se bouger. C’est encore loin d’être l’outil que l’on souhaiterait.»

A titre d’exemple, sur les quatre initiatives citoyennes qui ont obtenu le nombre minimum de signatures requis (un million dans sept pays différents) ces dernières années – sur le droit à l’eau, la vivisection, la protection juridique de l’embryon ou le glyphosate –, aucune à ce jour n’a conduit la Commission européenne à soumettre un texte de loi.«Faire campagne contre l’élevage intensif, c’est important, avance cependant Claire Hincelin, de CIWF. Alors il fallait qu’on passe à un niveau de pression supérieur pour aboutir a minima à une position de l’UE. A ce sujet, il y a encore eu des avancées l’an passé puisque le Parlement européen a voté pour la fin de l’élevage en batterie des lapins.» Avec plus de 900 000 signatures amassées dans plus d’un quart des Etats membres à la mi-mai, l’association peut donc espérer parvenir à son but. Et ainsi plaider auprès des institutions européennes pour la promotion de solutions alternatives respectueuses du bien-être animal comme, a minima, le plein air.

Florian Bardou

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