Bien-être animal : les industriels s’y mettent à pas comptés

La loi EGalim, agriculture et alimentation, promulguée début novembre, porte notamment sur le bien-être animal. Plusieurs contiennent des mesures visant à améliorer les conditions de vie et d’abattage des animaux d’élevage.

Les images souvent insoutenables diffusées par l’association L214 d’abattoirs qui martyrisent les animaux ont marqué les esprits. Plusieurs textes de la loi EGAlim promulguée le premier novembre dernier qui fixe les nouvelles règles concernant l’agriculture et l’alimentation, portent sur l’amélioration du bien-être animal avec une «  extension du délit de maltraitance animale en élevage aux activités de transport et d’abattage  ».

Dans chaque abattoir, il est notamment prévu la désignation d’un responsable de la protection animale qui aura le statut de «  lanceur d’alerte  ». Par contre, les parlementaires ont refusé la généralisation de la vidéosurveillance, réclamée depuis longtemps par les associations de défense des animaux. Elle sera mise en place seulement dans les abattoirs volontaires, pour une période expérimentale de deux ans.

Le groupe coopératif Cooperl estime être en phase avec la loi, puisque «  des caméras sont d’ores et déjà installées dans les différents lieux d’abattage, par ailleurs en permanence surveillés par des vétérinaires publics », précise Patrice Drillet, son président.

En Corrèze, Creuse et Haute-Vienne, une soixantaine d’éleveurs participent à la construction d’un nouvel abattoir « high-tech ». La présence humaine sera supprimée dans la zone d’abattage. Un écran y projettera des paysages complétés par un diffuseur d’odeurs familières pour les animaux avant qu’un bras robotisé ne vienne l’abattre, avec un objectif :  limiter le stress et la peur de l’animal .

Broyage des poussins

Député LREM de la Côte-d’Or, Didier Martin dit avoir «  mesuré le degré de cruauté des conditions d’élevage de certains animaux, tels que les poules pondeuses en cages  ». S’il a voté la loi EGalim, il pense «  qu’il faudra revenir sans tarder sur le sujet du respect de l’animal et élaborer une nouvelle proposition de loi  ». Il estime notamment que le broyage des poussins vivants est une «  véritable barbarie  ».

Chargé de ce dossier au sein de l’association L214, Sylvain Dibiane estime aussi que le Parlement n’est pas allé assez loin. «  Nous avons proposé 15 mesures qui ont toutes été rejetées par le gouvernement et le rapporteur du texte  », indique Sylvain Dibiane. Il fait notamment référence au transport des animaux. Si des sanctions pourront désormais être prises envers ceux qui les maltraitent, L214 aurait souhaité que la durée de transport soit de 8 heures maximum pour les bovins et de 4 heures pour les poules. Il n’en est rien. «  Motif de satisfaction  », indique tout de même la Fondation 30 millions d’amis,  le délit de mauvais traitements est étendu aux personnes morales.

Une charte du bien-être animal

L’institut de recherche Inra se penche depuis plusieurs années sur la situation des animaux d’élevage . Il anime notamment le Centre national de référencement sur le bien-être animal. Créé en 2017 suite à une décision européenne, il rassemble une quarantaine d’organismes. «  N’oublions pas que les animaux sont dotés d’un cerveau  », indique son directeur, Alain Boissy. Ce chercheur travaille sur un projet de charte qui pourrait être appliquée dans les élevages. Des grilles d’évaluation sont envisagées qui permettront l’organisation d’audits dans les fermes.

Nombre d’éleveurs disent ne pas craindre ce type de charte. Chez Cooperl, la plupart des porcs ne sont désormais plus castrés. Le meulage des dents est également en recul, de même que le coupage des queues des porcelets. «  On se doit de respecter les normes du bien-être, mais certains actes sont compliqués à stopper définitivement, comme la caudectomie  », insiste François Valy, président de la section porcine à la FRSEA de Bretagne. Un porcelet qui garde sa queue peut être blessé par un autre animal et doit être euthanasié.

Reste que dans le bio, les normes sont plus strictes. Tous les animaux disposent d’un parcours extérieur. Les castrations se font uniquement sous anesthésie. De plus, l’épointage du bec, l’écornage et le raccourcissement de la queue des agneaux ne sont possibles qu’à titre strictement exceptionnel.

Stanislas du Guerny
Correspondant à Rennes

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