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La filière se prépare à sortir des cages

L’interprofession de l’œuf a lancé un contrat sociétal d’avenir en octobre dernier, pour faire évoluer les modes d’élevage des poules pondeuses. « Nous voulons répondre à l’évolution de la demande sociétale qui s’amplifie » pour des œufs produits en systèmes alternatifs, a expliqué Philippe Juven, président de l’interprofession des œufs (CNPO), lors d’une conférence de presse le 3 mai à Paris.

Ce contrat vise à atteindre 50 % de poules en élevages alternatifs d’ici à 2022. Alors que 68 % des pondeuses sont aujourd’hui élevées en cage, cette décision implique de faire passer 10 millions de poules en systèmes alternatifs en cinq ans, soit 2 millions par an.

Investissements de 500 millions d’euros

Ce qui implique des investissements lourds : investissements en équipements nouveaux, voire en bâtiments et en terrains (pour le plein air), ainsi que des aides à la cessation d’activité pour une partie des éleveurs de poules en cage qui ne peuvent ou ne veulent pas changer de système. La filière en chiffre le montant total à 500 millions d’euros.

Or, les éleveurs ont déjà procédé à des investissements lourds en 2012, afin de se conformer à l’évolution de la règlementation européenne. Il leur est difficile de s’engager de nouveau dans des travaux coûteux, et ils n’ont pas droit à l’erreur. Les distributeurs doivent aussi mettre la main à la poche, à hauteur d’environ 100 M€, par exemple pour prendre en charge le financement des cessations. Quelle forme prendrait leur contribution (CVO ou autre), c’est encore en réflexion. En revanche, le CNPO ne compte pas demander d’aides à l’État.

Négocier des délais supplémentaires

Pris de court par les exigences soudaines des distributeurs, qui ont surenchéri dans leurs annonces de passage à 0 % d’œufs en cage avant 2025, 2022 voire 2020, le CNPO veut négocier des délais supplémentaires, craignant que le rythme de conversion de 2 millions de poules par an ne soit pas atteignable. « On ne peut pas répondre à la demande d’ici à 2020, il y a des délais de mise en œuvre incompressibles, par exemple pour construire de nouveaux bâtiments », a insisté Philippe Juven.

Il faudra aussi mieux rémunérer les éleveurs en systèmes alternatifs. Philippe Juven rappelle quelques chiffres préoccupants : entre 2005 et 2015, les coûts de production se sont accrus de 43 % pour les systèmes avec cages, et de 32 % pour le bio, alors qu’en parallèle, le prix des œufs en grande surface augmentait de seulement 2,5 % en cage et qu’il reculait de 6 % en bio.

Le contrat sociétal collectif sera négocié par l’interprofession avec les distributeurs, mais aussi les banques, le ministère, les industriels, les Safer, les associations de bien-être animal…

Aller plus loin

Mais la filière compte consolider sa démarche vertueuse. « La réglementation européenne est la plus stricte au monde, a rappelé Philippe Juven. Mais nous comptons aller au-delà. Le CNPO compte aller au-delà, en poursuivant la réduction de l’utilisation d’antibiotiques et en menant une évolution des techniques d’élevage comme l’épointage. » La charte « Œufs pondus en France » serait également renforcée, avec l’obligation de suivre la charte sanitaire de la filière, ainsi que la démarche d’alimentation durable et de qualité Duralim.

Consommation : les Français plébiscitent les œufs

“Selon une enquête du CSA pour le CNPO, ils sont 96 % à en consommer.”

Un aliment indispensable, produit naturel et bon pour la santé, ingrédient culinaire : l’œuf possède une image solide, avec « une consommation au beau fixe », souligne Loïc Coulombel, administrateur du CNPO.

En 2016, les Français ont ainsi mangé 218 œufs par an, soit 14,3 milliards d’œufs au total, tous débouchés confondus (ménages et industriels). Les achats par les ménages sont stables (–0,7 % par rapport à 2015), pour une consommation régulière : 85 % en cuisinent au moins une fois par semaine. Ils apprécient en particulier le fait que ce produit soit facile et rapide à préparer : œuf au plat, omelette, œuf à la coque…

Aujourd’hui, 52 % des œufs consommés par les ménages sont issus de poules élevées en cage. Mais les tendances divergent selon le mode de production : les achats d’œufs bio sont en hausse de 12,9 %, ceux d’œufs de label rouge de 9,1 %, tandis que ceux d’œufs standards reculent de 6,5 %.

Le mode d’élevage prioritaire dans l’achat

Mais si les Français aiment les œufs, ils les veulent français, produits localement. Surtout, ils les veulent produits dans de bonnes conditions pour les animaux. En effet, l’enquête souligne que le premier critère d’achat des œufs est le mode d’élevage, le deuxième étant le prix. Étonnamment, les différents codes (0 pour le bio, 1 pour le plein air, 2 pour le sol et 3 pour le standard) sont bien identifiés par 79 % des consommateurs.

E.C.

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