Les 40000 poules de Saint-Morel au tribunal

Six mois après le début du projet de construction d’un poulailler dans la commune, le débat fait toujours rage et les avis sont tranchés.

En juin dernier, le projet d‘un agriculteur basé à Mont-Saint-Martin de créer un élevage de poules pondeuses sur le territoire de la commune de Saint-Morel faisait grincer des dents élus et habitants. Les critiques étaient nombreuses, et l‘opposition féroce. Dans les prochains jours, le duel opposant la population à l‘agriculteur pourrait arriver à son terme.

Toujours aucun accord

Dans la mairie de Saint-Morel, hier matin, les mines étaient mornes. Et pour cause : dans la même pièce se trouvaient Sylvain Gouble, le porteur du projet du poulailler, et le maire de la commune Thierry Deglaire. Entre les deux hommes, cela fait six mois qu‘une « bataille » fait rage. Sans un mot de plus, le maire quitte la pièce pour s‘exprimer : «  il est venu demander la carte communale de Saint-Morel, sûrement sur demande de son avocat  ». Car depuis quelque temps, la querelle est montée d‘un niveau, et les parties sont désormais engagées dans une procédure judiciaire.

Pour Thierry Deglaire, les dangers relatifs à l’installation des 40 000 poules pondeuses au hameau de Corbon tiennent en trois points. «  D‘abord, la voie communale qui dessert le poulailler n‘est pas du tout adaptée au trafic de poids lourds. D‘ailleurs, sur décision unanime du conseil municipal, nous l‘avons limitée aux véhicules de moins de 3,5 tonnes. Je me demande bien comment l‘agriculteur compte faire avec cette interdiction… ».

«Nous ne sommes pas contre l’installation

d’un poulailler, tant qu’il se déplace de deux kilomètres afin de ne pas gêner mes administrés»

Thierry Deglaire, maire de Saint-Morel

Ensuite, la proximité du poulailler et des premières habitations : 350 mètres. «  C‘est beaucoup trop près, surtout que les vents forts vont déverser toute la pollution olfactive sur les habitants du hameau  », précise le maire.

Enfin, le poulailler et la pollution occasionnée risqueraient de mettre en danger la pisciculture située à 350 mètres : pour Thierry Deglaire, l‘installation des poules «  condamnerait les poissons  ».

Pour autant, le maire n‘est pas défavorable à l‘installation d‘un poulailler. «  J‘ai toujours favorisé la consommation locale. Simplement, la localisation actuelle du projet est inacceptable  ».

Si, bientôt, les parties se retrouveront devant le tribunal administratif, Thierry Deglaire n‘en est pas moins réaliste. Selon lui, il y a «  9 chances sur 10 que le porteur du projet obtienne gain de cause  ». En effet, la législation actuellement en vigueur prévoit qu‘un poulailler ne peut se situer à moins de 100 mètres d‘une habitation. «  Cette loi est aberrante, vous imaginez vous retrouver avec 40 000 poules pondeuses à 100 mètres de votre fenêtre ? C‘est une question de bon-sens et de savoir vivre-ensemble », s‘insurge le maire.

Reste à savoir si l‘influence présumée néfaste du poulailler sur la pisciculture saura convaincre le tribunal administratif. En tous cas, il semble que le maire de Saint-Morel et ses habitants ne comptent pas abandonner si facilement.

Jérémy Denieulle

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